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Un projet relationnel à clarifier
Je suis ravi de continuer le chemin entrepris ensemble depuis plusieurs semaines. Nous nous sommes arrêtés pour (1) savoir comment couper les ponts, (2) les raisons pour lesquels le faire, (3) les modalités pour vivre cette rupture relationnelle et aujourd’hui pour renouer le dialogue.
Après la pluie, le beau temps
J’ai choisi d’aborder ce sujet parce qu’en général, après un temps de rupture, vient le moment où il est sage de penser à renouer le dialogue. J’ai choisi sciemment d’utiliser l’expression «en général » parce que je ne voudrais pas que ce soit intégré comme forcément systématique. Rien ne vous contraint à renouer le dialogue.
Si vous n’avez pas dynamité les ponts, les gares et les aéroports, vous pouvez choisir de maintenir cette prise de distance, ou cette absence de dialogue et de relation, pendant un temps plus ou moins indéterminé. Cela correspondra à votre état personnel.
Bien entendu, si vous avez vécu une situation de souffrance terrible, selon vous, et que vous ne vous en êtes pas encore remis, il va de soi que vous ne soyiez pas en mesure de renouer le dialogue. Il n’y a aucune obligation, devoir ou contrainte.
Il importe que vous viviez cette dynamique pour la liberté de votre perception d’expérience. Qu’il s’agisse d’expérience de souffrance, de reconstruction, de perspective, d’un projet de relation que vous clarifierez. Or, dans un projet relationnel que l’on clarifie, il peut y avoir celui de ne plus être en relation. On peut y inclure être en relation différemment comme de ne plus l’être du tout.
C’est important de l’intégrer également pour vivre ce choix de ne pas renouer le dialogue sans aucune culpabilité. Même s’il n’y a pas de décision de justice définissant un périmètre à respecter dans la fréquentation de la personne qui pourrait être à l’origine d’une de nos souffrances. Libre à vous de penser « je choisis de vivre une vraie distance pour ne plus croiser cette personne de nouveau ». Il n’est pas question de couper les ponts, mais d’être en distance relationnelle durable.
Rien n’est définitif sur terre
J’ai pour habitude, ou plutôt tendance, de préférer que certaines choses de la vie ne soient pas considérées comme définitivement fermées. Je m’inspire en cela de la vie elle-même.
Cette capacité à pouvoir garder les choses ouvertes peut déboucher sur un champ des possibles que l’on peut ne pas soupçonner sur l’instant. Et même s’il n’y a pas de relation en perspective dans un projet à venir, je préfère que la relation reste potentiellement possible.
Encore une fois, si vous souffrez de revivences, dans le cas d’un stress post-traumatique ou d’un traumatisme très fort, vous aurez besoin de conserver une relation fermée. Si c’est préférable pour vous, gardez l’idée que la relation restera à jamais close.
Je sais que certaines pensées telles que « si je ferme définitivement, ce sera peut-être trop dur pour lui », « ce serait plus sympa si… ». Vous n’avez pas d’obligation ou de devoir d’être sympa. Vous avez obligation et devoir d’être vous-même. En même temps, vous ne pouvez faire autrement 😉
Continuez donc à vous construire et à faire proliférer la vie qui est en vous pour vous en faire profiter comment pour en faire jouir ceux qui vous entourent. C’est la priorité. On s’en fout des autres ! Vous souffrez, vous avez le sentiment d’avoir été abusé, d’avoir vécu une relation toxique avec une personne alors tant pis pour l’autre. Donnez-vous la priorité.
J’ai pris le temps de noter 7 éléments pour renouer le dialogue. Je vous les présente avec plaisir.
1. Créer un cadre nouveau
La première action que je vous présente consiste à créer un cadre nouveau qui sera en tendre et ferme même temps. C’est à partir de ce nouveau cadre que la relation sera de ré établie.
Je tiens à ce qualificatif « nouveau » qui nous place dans une perspective non connue. C’est-à-dire que rien, ou la plupart, des éléments de l’approche relationnelle à venir n’existaient antérieurement.
Il est important que la personne vers laquelle vous dirigerez pour lui dire « je veux un retour du dialogue » comprenne que le cadre ancien est révolu. Il n’y a plus de possibilités de retour en arrière. D’ailleurs, toute tentative de retour en arrière sera potentiellement synonyme d’une nouvelle rupture relationnelle.
Et pourquoi je parle de tendresse ? J’aime cette notion de la tendre fermeté, une idée que j’ai prise chez Gisèle Georges qui était pédopsychiatre à l’hôpital Robert Debré à Paris et autrice de « Mon enfant s’oppose. Que dire ? Que faire ? » aux éditions Odile Jacob. Dans son ouvrage, elle parle de la capacité à être à l’écoute de l’enfant tout en posant un cadre. Mais parfois, nous sommes tentés de bouger le cadre. Pour l’éviter, cela demande une réflexion antérieure. Cela permet de limiter les pensées de type :
- Peut-être ai-je conçu un cadre trop ferme !
- Il aurait peut-être été mieux que je mette la barrière à tel endroit au lieu de la mettre là…
- Peut-être que ce n’est pas sympa de…
- Etc.
Si vous avez pris le temps de bien réfléchir, vous pourrez poser un cadre à l’endroit où vous pensez qu’il est sage de l’installer (une balise, une barrière, limite, un portail…) Et comme votre réflexion aura été fondée, vous pourrez faire votre choix sans culpabilité. En plus, vous pouvez le faire avec tendresse, sans dureté. Votre décision sera claire, nette et fondée. Ce qui nous conduit au point suivant…
2. Refuser les compromis
La décision prise après une réelle réflexion ne se discute pas. Il n’existe donc pas de compromis avec ce que vous avez pris le temps de mûrir, de réfléchir et d’acter. Donc pas de compromis avec vos valeurs. En effet, c’est à partir de vos valeurs que vous poserez votre cadre et votre nouvelle approche relationnelle.
Il est vraiment important de prendre conscience de cette réalité parce que le nouveau cadre que vous mettrez en œuvre signifiera que vous vous rapprocherez de vous-même.
Vous avez remarqué que dans les démarches précédentes, dans la vision qui consiste à rompre le dialogue, il était question de vous retrouver vous-même pour vous ressourcer, pour vous reconstruire. Par conséquent, remettant un cadre nouveau fondé sur des valeurs, vous vous êtes rapproché de vous-même.
Le faire ainsi peut être une opportunité pour vous conduire à vous dire « qu’est-ce qui, dans la relation considérée comme toxique ou néfaste, a enfreint une limite d’une de mes valeurs ?».
Dans la suite de votre réflexion, vous pourrez poursuivre en vous disant « ayant identifié l’élément qui a enfreint la limite de mes valeurs, que puis-je faire pour que cette limite ne soit plus franchie grâce à un cadre plus explicite, sans une once d’ambiguïté ? Je veux faire en sorte qu’il soit évident que je ne veuille plus que telle valeur soit atteinte par une parole ou un geste ». De facto, vous travaillerez sans compromis.
La semaine prochaine, je m’arrêterai sur le négociable et le non négociable pour expliquer ce que je veux dire en évoquant une approche sans compromis.
3. Rester à l’écoute dans la durée
Ensuite, il s’agit de rester à l’écoute de l’autre. Mais alors, me direz-vous « si j’ai travaillé sur mes valeurs en refusant le compromis, pourquoi rester à l’écoute de l’autre ? ». Parce que rester à l’écoute consiste à rentrer dans le dialogue. C’est essentiel. Cela signifie que ce n’est pas parce que je refuse le compromis que cela annihile ma capacité d’écoute. C’est un principe relationnel que le train à l’écoute.
D’ailleurs, je développerai également la semaine prochaine dans le sujet négociable et le non négociable pour vous donner les éléments vous aidant à comprendre dans quel but on se met à l’écoute.
4. Rester réaliste
À ce stade, il s’agit de rester réaliste. Attention aux utopies et aux rêves relationnels (ce qui est un pléonasme) ! « Avant, ce n’était pas bien, mais maintenant, comme on a placé un cadre nouveau, tout ira beaucoup mieux ! ». Cela n’implique pas de sans nourrir une désillusion, non plus.
Ne vous jetez pas de poudre aux yeux en vous laissant croire à de tels mirages. Vous êtes encore sur terre, dans le monde des humains. Or, dans notre monde, un projet qui se déroule exactement comme on l’avait rêvé n’existe que très rarement. Parfois c’est moins bien et d’autres fois c’est mieux qu’en rêve. Dans les deux cas, la réalité diffère.
Cette prise de conscience signifie que vous passerez par des hauts et des bas relationnels. Il est donc possible que vous ayez l’impression, même si ce n’est pas forcément fondé, que vous risquez de revivre des éléments proches de ceux qui ont engendré votre souffrance.
Attention de bien faire la différence entre votre impression et la réalité. C’est la raison pour laquelle il est important que vous ayez mis un cadre nouveau clair et que ce cadre ait été explicité, verbalisé. Quelque part, je vous propose de le présenter comme un contrat.
Finalement, quand vous présenterez le cadre, vous poserez la question « est-ce que le cadre que je te propose te paraît accessible ? En quoi l’est-il ? ». La nouvelle relation se vivra donc avec les pieds sur terre par plus de réalisme.
5. Ne pas couper la parole
Maintenant, vous vous mettrez à l’écoute. Après avoir posé la question, vous veillerez à être en mesure d’entendre si le cadre nouveau que vous avez proposé paraît accessible ou réaliste. Dans ce temps d’écoute, ne coupez pas la parole même si vous n’êtes pas d’accord avec ce que vous entendez.
L’important, d’ailleurs, n’est pas que la personne soit d’accord avec votre cadre nouveau, mais que vous l’entendiez afin de voir en quoi ce qu’elle a reformulé vous permet de continuer à envisager une relation saine. C’est la mission de ce temps d’écoute. Finalement, intégrer qu’il est temps que la personne s’ouvre, qu’elle se révèle à vous. Or, dans ce temps de révélation, si vous lui coupez la parole, vous risquez de l’orienter. Écoutez-la religieusement et ne prenez la parole qu’une fois son retour terminé.
Exemple pratique
Par exemple, si vous avez dit « je veux bien être en relation avec toi, mais dans un cadre nouveau. Et dans ce dernier, je ne veux aucun geste ambigu. Il m’importe qu’aucun geste ne soit au-dessus de la ceinture. J’ajoute même que je voudrais que dans ton choix de parole, tu respectes notre amitié dans la mesure où je percevrai que tu me vois comme une personne et non une paire de fesses… ». Après une telle affirmation, le temps vient de demander : « comment vois-tu les choses ? »
Cette interrogation a pour objet de tendre la perche pour que l’autre prenne la parole. La personne s’exprimera donc. Si elle vous dit « oui je comprends ce que tu dis et je voudrais que tu saches que… quand j’ai fait ça (si vous voyez qu’elle se retourne dans le passé, vous pouvez percevoir qu’elle n’a pas encore tourné la page et qu’il est donc prudent d’être encore plus attentif à ce qu’elle dira. Parce que si dans la suite de sa phrase elle vous dit…) ce n’était vraiment pas dans le but de ceci ou de cela. Je l’ai fait parce que… (et que vous percevez qu’elle se justifie, vous intégrez qu’elle n’a pas encore compris à quel point vous avez été blessé et que c’est inacceptable pour vous de revivre ce que vous avez déjà vécu).
Reste donc à vous de lui demander « as-tu compris que ce qui s’est passé et véritablement inacceptable pour moi ?». Si elle poursuit en disant « oui oui, j’ai bien compris, mais… » vous comprenez qu’elle trouve que son attitude a été inacceptable en partie, parce qu’elle se justifiait au moins un peu. C’est une manière inconsciente de vous faire porter une partie de la responsabilité de son acte à elle. Soyez donc bien attentif à la manière dont l’autre formulera sa pensée.
Cette démarche est pour vous l’occasion de saisir le fil de la pensée, la vision et la motivation de l’autre. Laissez donc de la place aux silences, offrant ainsi le temps de réfléchir.
Si vous percevez que le silence s’installe, invitez-là à poursuivre « y a-t-il autre chose que tu voudrais rajouter ?». Ne pensez pas qu’une réponse équivaut à toutes les réponses. Et quand elle vous a donné une réponse supplémentaire, demandez-lui « autre chose… ? ». Elle vous répond. Préparez-vous à lui demander une fois encore « encore autre chose ? » jusqu’à ce qu’elle n’ait plus rien à dire.
À ce moment-là, prenez la parole. Vous pourrez formuler « quand tu as dit ça, j’ai compris que… Est-ce bien ce que tu voulais dire ? » en entrant alors dans la recherche de la compréhension.
6. Penser et parler pour soi-même
Penser à parler uniquement pour vous. Ne parlez pas pour la personne en commençant à penser à sa place en vous disant « si elle me dit ça, c’est que… ». Non, non, non. Demandez-lui « quand tu dis ça, veux-tu dire que ? ». Avec cette question fermée, elle est invitée à vous dire oui ou non.
Ne vous laissez pas aller à déduire des choses de ce qui vous sera dit. Si vous voulez déduire quelque chose, aidez-vous de questions en disant « j’en déduis donc que ceci et cela… Par conséquent tu as choisi de faire ceci et cela ? Est-ce que ma déduction est correcte ? ». Entrez dans cette dynamique ayant pour but de l’entendre vous répondre oui ou non. Si la personne tente de noyer le poisson, vous avez compris que le moment est venu de ramener votre cadre nouveau à la maison pour le lui présenter bien plus tard, une autre fois.
Lors des rendez-vous précédents nous avons parlé de signes à percevoir en vous avant d’envisager de renouer le dialogue. Maintenant, il est question de voir des signes en l’autre. Ouvrez l’œil pour identifier les signaux qui pourraient vous permettre de percevoir un potentiel danger. Tant que vous en voyez, ne vous précipitez pas de nouveau dans la relation. Reprenez de la distance ou clarifiez le besoin de laisser mûrir notre relation à venir.
7. Vivre la gratitude
Après que vous ayez fini de chercher à comprendre (sans penser à la place de l’autre), vient le temps de la gratitude.
Vous pourrez exprimer de la gratitude à vous-même. Je tiens à ce que vous soyez le premier servi en gratitude. Manifestez la gratitude parce que vous avez…
- choisi de faire une démarche courageuse et constructive,
- avez travaillé, réfléchi, pondu un cadre nouveau,
- travaillé sur vos valeurs,
- choisi de ne pas faire de compromis,
- choisi de rester à l’écoute,
- cherché à proposer quelque chose de réaliste,
- écouté la personne sans lui couper la parole et travailler de manière à chercher à la comprendre,
- utilisé votre expérience relationnelle pour avancer et grandir et cela, quelque soit le devenir de la relation ! Même si à l’issue de l’entretien vous vous êtes dit qu’il était préférable pour vous de rentrer à la maison avec votre cadre nouveau sous le bras, vous pouvez quand même vivre la gratitude pour la démarche en soi.
Ensuite, vous pouvez la vivre sans projection utopique même si la personne a accepté votre cadre nouveau. Vivez la gratitude pour :
- le plaisir du principe d’une relation en reconstruction.
- le principe du dialogue qui revient sans fonder votre gratitude sur la qualité ou le plaisir que vous procurera le retour de la relation. C’est le principe de la relation qui prévaut.
Ensuite, le plaisir du résultat de la relation ne sera que la cerise sur le gâteau. En effet, il ne peut y avoir de plaisir sans passer par une reconstruction relationnelle. C’est la raison pour laquelle je préfère que cette dernière soit mise au troisième plan. D’autant plus ce que vous pouvez être déçu du résultat. En effet, si vous vous retrouvez dans une relation qui ne vous procure pas tout le plaisir que vous vouliez, vous impacterez négativement votre gratitude. Pourtant, vous avez quand même fait la démarche de renouer le dialogue et de travailler à une approche de reconstruction humaine, de grandissement de l’humain.
Faites le point dans quelque temps
Gardez à l’esprit qu’après avoir vécu les 7 étapes découvertes aujourd’hui, il vous reste la liberté de faire le point. D’ailleurs, j’encourage à anticiper l’idée de faire un bilan lors de l’entretien si le cadre nouveau a été accepté. Vous pouvez tout simplement dire « je propose que nous fassions un point dans quelques temps. Est-ce que tu es d’accord avec cette idée ?». La plupart du temps, la réponse est positive. Ce sera l’occasion de voir comment vous vivez le cadre nouveau.
L’intention n’est pas de fêter la super relation avec ses résultats jouissifs, mais de faire un point sur le principe de la relation. C’est l’occasion de :
- voir si le cadre nouveau qui présenté convient à la personne.
- Ensuite, de faire le point sur soi-même, savoir comment on vit la relation et pouvoir l’exprimer.
- d’apporter des modifications si vous avez décidé de construire votre cadre nouveau par paliers.
C’est tout à fait envisageable de veiller à laisser le cadre à un certain niveau en attendant la présence de certains signaux pour passer à un autre palier du cadre nouveau. Cela a l’avantage de vous laisser la latitude d’ouvrir ou de fermer des aspects du cadre relationnel en fonction de notre vécu de la relationnelle nouvelle.
Le dialogue
Je n’ai pas pris le temps de définir le mot dialogue. Son étymologie est fondée sur logos, en grec, la parole, le verbe, le mot associé au préfixe dia qui signifie à travers, entre. Cela signifie que la parole part d’une personne vers une autre. Il y a donc échange, rencontre, d’où l’importance de ce terme que je chéris. Le dialogue n’existe que si l’on se met à l’écoute après avoir exprimé son cadre nouveau.
Comme nous le verrons la semaine prochaine, il est essentiel de savoir où se situent le négociable et le non négociable dans une approche relationnelle, qu’il s’agisse de relations toxiques ou pas.
Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une bonne semaine.
Bye-bye
Merci pr cet article qui tombe à pic ! On a tous des personnes avce qui on a coupé les ponts et qu’on regrette de ne pas avoir fait plus d’efforts ! Une personne de l’entourage peut également faire l’intermédiaire pour rallier les 2 personnes aussi !
Alors au travail ! Utilise les moyens que je te propose. Tu me diras ce que tu en penses.